Art. 6 Tribunal de commerce
1 Les cantons peuvent instituer un tribunal spécial qui statue en tant qu’instance cantonale unique sur les litiges commerciaux (tribunal de commerce).
2 Un litige est considéré comme commercial aux conditions suivantes:
a.
l’activité commerciale d’une partie au moins est concernée;
b.
un recours en matière civile au Tribunal fédéral peut être intenté contre la décision;
c.
les parties sont inscrites au registre du commerce suisse ou dans un registre étranger équivalent.
3 Le demandeur peut agir soit devant le tribunal de commerce soit devant le tribunal ordinaire, si toutes les conditions sont remplies mais que seul le défendeur est inscrit au registre du commerce suisse ou dans un registre étranger équivalent.
4 Les cantons peuvent également attribuer au tribunal de commerce:
a.
les litiges mentionnés à l’art. 5, al. 1;
b.
les litiges relevant du droit des sociétés commerciales et coopératives.
5 Le tribunal de commerce est également compétent pour statuer sur les mesures provisionnelles requises avant litispendance.
Les cantons d’Argovie, de Berne, de St Gall et de Zurich, disposent d’importants tribunaux de commerce spécialisés qui ont remarquablement fait leurs preuves. L’association aux magistrats des juridictions supérieures de juges spécialisés non professionnels issus des branches concernées en constitue le principal atout. Ces juridictions sont exercées par les tribunaux supérieurs de ces cantons, ce qui renforce l’autorité de leurs jugements. Leur rôle international également exclut leur abolition. L’institution des tribunaux de commerce spécialisés est laissée à la liberté des cantons, mais le Conseil fédéral souhaite – comme la commission d’experts – en faciliter l’introduction. Sur ce point, le projet va plus loin que l’avant-projet. Les tribunaux de commerce statueront en instance unique , sans la possibilité de recours, ne serait-ce que restreint, à une autorité cantonale judiciaire supérieure, comme la prévoyait l’avant-projet. Les décisions de ces tribunaux seront directement passibles de recours en matière civile au Tribunal fédéral. La LTF autorise cette dérogation au principe de la double instance cantonale (art. 75 al. 2 let. b LTF). Elle a été souhaitée en procédure de consultation (al. 1). La limitation des instances est commandée non seulement par la technicité de ces affaires mais aussi par la célérité que requièrent les procédures commerciales.
La compétence matérielle des tribunaux de commerce, inspirée des règles cantonales, est subordonnée à trois critères cumulatifs: le litige doit résulter de l’activité commerciale d’une partie au moins (al. 2 let. a), la décision à rendre doit être susceptible de recours civil au Tribunal fédéral (al. 2 let. b) et les parties doivent être inscrites au registre du commerce suisse ou étranger (al 2 let. c). Le projet, plus restrictif que le droit actuel sur ce point et contrairement à l’avant-projet, requiert l’inscription des deux parties à la procédure au registre du commerce. L’acceptation tacite de la compétence, contrairement toujours à la solution de l’avant-projet, n’est pas admise. Ces choix ont été dictés par le souci d’éviter que le contentieux de la consommation de plus de 30 000 francs – l’achat d’un véhicule privé par exemple – ne relève des tribunaux de commerce plutôt que de la juridiction ordinaire. L’admission de l’acceptation tacite pourrait exposer la partie au risque de perdre sans le vouloir la double instance cantonale de la procédure ordinaire. Ce nonobstant, la compétence matérielle des tribunaux de commerce est délibérément large. L’al. 3 permet aux cantons de l’étendre encore aux litiges énumérés à l’art. 5 ainsi qu’aux litiges du droit des sociétés, des fonds de placement et des emprunts par obligations. Ils ont la faculté de subordonner l’extension à une valeur litigieuse. Le tribunal de commerce éventuellement institué est toujours compétent en matière de mesures provisionnelles (al. 4) afin d’éviter l’éclatement de la procédure.